Pierre Vimont a été en charge d'un certain nombre d'affaires qui ont éprouvé sa capacité de négociateur.
Lorsqu'il était directeur de cabinet de Michel Barnier en 2004-2005, Pierre Vimont a eu à gérer une affaire qui eut un retentissement important et qui a duré neuf longs mois : l’enlèvement des journalistes français Christian Chesnot, Georges Malbrunot et Florence Aubenas et de leur chauffeur et interprète syrien, par l'Armée islamique en Irak. Il revient sur cette prise d'otages, en rappelant la difficulté de défendre à la fois les intérêts et les valeurs sans se compromettre : « c'est tout le problème du réalisme qu'il faut avoir en diplomatie : il faut parfois discuter avec le diable sans perdre de vue l'importance des valeurs et nos objectifs fondamentaux, avec le souci d'arriver à des résultats concrets. » Il raconte la mise en place de la cellule de crise : « A la demande du Président Chirac, nous avons mis en place un groupe de quatre : son conseiller militaire, le directeur de cabinet du Premier ministre, le directeur général de la DGSE et moi-même (en lien avec notre ambassadeur en Irak).
Pierre Vimont commence par expliquer que la première initiative c'est de trouver des canaux de communication avec les ravisseurs « très soucieux de se protéger » et les intermédiaires, en prenant soin de séparer le bon grain de l'ivraie : « dans les affaires de prise d'otages, apparaissent comme des champignons des intermédiaires de toutes parts mais il faut les écouter quoi qu'il arrive. » Neuf mois interminables au cours desquels le lien a été maintenu avec la famille des journalistes et les différents interlocuteurs, notamment avec les journalistes de Libération.
Les revers de la diplomatie
En 2015, en pleine « crise migratoire », Pierre Vimont est l’Envoyé personnel du président du Conseil européen Donald Tusk. Il fut la cheville ouvrière du Sommet de la Vallette qui réunissait à Malte les chefs d’Etat et de gouvernement européens et les principaux dirigeants africains pour parler des migrations. Pierre Vimont explique que les Européens et les Africains ont des positions antagonistes sur les migrations, il confie que ces réunions n'ont pas permis de surmonter ce fossé profond : « Les africains voient l'immigration comme une richesse car l'essentiel de l'immigration se fait entre pays africains t**andis que les Européens sont inquiets et sont largement d'accord pour dire que l'immigration est un problème : l'immigration irrégulière, l'intégration des communautés, les tensions sur le droit d'asile, les désordres aux frontières. »
Maintenir le dialogue
En 2016 il est nommé Médiateur du Quai d’Orsay et envoyé au Moyen Orient pour tenter une médiation de paix entre Israël et Palestine sous l'impulsion du Ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Ce sera un échec. « Cette mission au départ, répondait à la demande d'un groupe de l'Assemblée nationale qui exigeait la reconnaissance d'un Etat palestinien. (...) L'essentiel de l'objectif (assez limité), c'était de montrer que la question palestinienne existait toujours et de remobiliser les pays arabes. »
Enfin, en 2019, il est Envoyé spécial « pour l’architecture de sécurité et de confiance avec la Russie » avant d’être nommé Représentant spécial du chef de l’Etat pour la Russie, poste qui s’est achevé le 24 février 2022. « Il s'agissait d'une part de relancer un dialogue bilatéral entre la France et la Russie car depuis la crise du Donbass de 2014, la France n'avait plus beaucoup de relations avec la Russie. D'autre part, il s'agissait de travailler avec nos partenaires européens pour reprendre le dialogue sur un certain nombre de domaines. »
Pierre Vimont est convaincu qu'il ne faut jamais rompre le dialogue, même en temps de guerre.
Générique
Une série d’entretiens proposée par Caroline Broué. Réalisation : Guillaume Baldy. Prise de son : Loïc Duros. Chargée de programmes : Daphné Abgrall. Coordination : Florian Delorme.
Pour aller plus loin
Pierre Vimont, « Religion et droits de l’homme : une perspective européenne », dans : La Diplomatie au défi des religions. Tensions, guerres, médiations. Ed.Odile Jacob, « Hors collection », 2014, p. 329-335.
Pierre Vimont, « Nation et Europe : la difficile synthèse de la diplomatie française », Revue Défense Nationale, 2021/6 (N° 841), p. 24-30.
Pierre Vimont, « L’ordre international face à l’Amérique de Trump », Politique étrangère, 2017/4 (Hiver), p. 65-74
Les trois tomes de la BD Quai d’Orsay de Christophe Blain et Abel Lanzac (Ed. Dargaud).
Quai d’Orsay, film de Bertrand Tavernier (2013). Disponible en VOD sur Canal+